09/30/2010 | Réjane Ereau.
Du 16 au 19 septembre, s’est tenu à Paris et en Normandie un colloque sur l’Âyurveda, réunissant quelques pointures internationales de cette “science de la vie” made in India. Le signe d’un essor et d’une reconnaissance croissante en Hexagone?
L’Âyurvéda n’est pas encore reconnu comme médecine en France
Une petite salle aux lumières tamisées, un tapis à même le sol. Deux mains expertes qui vous enduisent d’huiles et vous massent des pieds à la tête. Tantôt douces, pour vous poser, vous cocooner, tantôt énergiques pour débloquer les points de tension, stimuler les flux d’énergie, évacuer les toxines. Peu à peu, le corps lâche, la respiration se fait plus profonde, une chaleur envahit les bras, les jambes, le ventre…
Un concept méconnu en France
Pour la plupart des Français, “Âyurveda” n’évoque pas grand-chose. “Ayurvé quoi ?” disent les uns. “Une technique indienne de massage ?” se hasardent les autres. “Le massage n’est qu’un élément de cette discipline millénaire”, commente Kiran Vyas, fondateur et directeur du centre Tapovan, pionnier de l’Âyurveda en France. “Considérée en Inde comme une médecine, je préfère la positionner ici comme un art de vivre, une approche holistique du bien-être permettant de prévenir les maladies. Son principe même est de maintenir les gens en forme.”
Indications sur la manière dont fonctionne l’organisme, conseils diététiques et de mode de vie adaptés à la nature, l’âge et les besoins de chacun, exercices physiques, relaxation… “L’Ayurveda ne fait pas que soigner, il dit aux gens comment vivre”, poursuit Kiran Vyas. “Il les amène à prendre conscience de leur corps, à être à l’écoute de leurs sensations, à se reconnecter à eux-mêmes.”
De quoi titiller la curiosité du public français ? “On sent une aspiration à prendre soin de son corps, de sa forme. L’Âyurveda, comme le yoga, peut diminuer les maux de nos sociétés comme le stress, l’insomnie, la fatigue des yeux, les problèmes de dos ou d’arthrose. Pendant des années, pour diffuser ses principes et ses bienfaits, j’ai écrit des livres, fait des conférences… Et puis Madonna s’y est mis ! Le rayonnement de l’Âyurveda doit beaucoup à son usage par des stars d’Hollywood et de Bollywood.”
“Obtenir la reconnaissance légale de l’Âyurveda sur le reste de la planète”
Septembre 2010, l’Âyurveda tient colloque en France. Malgré la présence d’éminents docteurs, professeurs et chercheurs, l’événement ne touche qu’un noyau d’intéressés : adeptes des soins naturels, apprentis masseurs, médecins allopathes en recherche de nouvelles approches… “Ce symposium est avant tout l’occasion pour le monde de l’Âyurveda de se retrouver, de partager des expériences, de se motiver mutuellement”, explique Kiran Vyas. “Pour mes élèves, c’est aussi un moyen de rencontrer des pointures et d’élargir leurs connaissances.”
Le gouvernement indien ne compte pas en rester là : son ministère de la famille, de la santé et du bien-être s’est doté d’une commission spéciale nommée Ayush, chargée de promouvoir l’Âyurveda, mais aussi l’homéopathie, la médecine siddha et la médecine unani. Au pays de Gandhi comme ailleurs. “En Inde, les autorités poussent à la création de passerelles entre médecines modernes et traditionnelles, via la création de départements d’allopathie dans les hôpitaux ayurvédiques, et inversement”, confirme Kiran Vyas.
“Notre but est aussi d’obtenir la reconnaissance légale de l’Âyurveda sur le reste de la planète”, lance le professeur M.S. Baghel, directeur du CHU d’Âyurveda de Jamnagar (Gujarat) et expert auprès du gouvernement. “L’Inde a donné au monde sa philosophie, puis le yoga ; il est temps qu’elle lui donne l’Âyurveda ! Son apport, fondé notamment sur la prise en compte des énergies, est complémentaire à celui de la médecine moderne.”
Déjà populaire aux USA, bientôt en Europe ?
D’où l’attribution d’aides financières par les autorités indiennes à qui voudrait créer une chaire d’Âyurveda ou un centre ayurvédique dans son pays, traduire des livres dans sa langue, se former à l’Âyurveda en Inde… “32 étrangers venus de 21 pays suivent actuellement la formation complète à l’université du Gujarat”, note le Pr Baghel.
En France, le chemin est encore long. L’Âyurveda n’est pas reconnu comme médecine, ses médicaments ne peuvent être importés. Et le manque de législation laisse la porte ouverte aux charlatans. “Sa maîtrise ne s’improvise pas ! tonne Kiran Vyas. Certains se disent masseurs ayurvédiques après seulement deux ou trois week-ends d’initiation !”
Aux USA, la popularité croissante de l’Âyurveda a aussi fait émerger des besoins de régulation : sur le savoir-faire des praticiens, la qualité des formations, l’authenticité des matières premières… “En Angleterre et en Allemagne, l’approche est plus libérale qu’en France”, souligne Kiran Vyas, “mais l’Union européenne prévoit pour 2011 une directive destinée à réguler les soins à base de plantes. On ne sait pas ce que ça va devenir ! Pourtant, une approche préventive et naturelle permettrait sûrement de réduire le mal-être de nos sociétés. Et le trou de la sécurité sociale…”
Le livre de l’Ayurveda. Le guide personnel du Bien-être Manufacturer: Courrier du Livre Part Number: Price: EUR 22,31
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