08/29/2008 | Dilip Kaliya.
La persécution des chrétiens en Orissa par des militants hindous dure depuis bientôt une semaine. Incapable d’arrêter les violences, le gouvernement indien est aujourd’hui montré du doigt.
Ce vendredi matin en Inde, les portes des 30 000 institutions chrétiennes d’enseignement sont restées closes, en signe de protestation contre les violences dont sont victimes les chrétiens de l’Orissa depuis cinq jours. Dans cet État de l’est de l’Inde, le meurtre samedi dernier d’un dirigeant local du Vishwa Hindu Parishad (VHP, ou Conseil mondial hindou), a en effet déclenché des émeutes, certains activistes hindous accusant la communauté chrétienne d’être à l’origine de l’attaque bien que la police l’ait, elle, attribué à la guérilla maoïste.
Le bilan officiel est de 11 morts et de 25 églises incendiées. Des centaines d’institutions et de maisons chrétiennes ont par ailleurs été saccagées, notamment dans le district de Kandhamal, où se concentre l’essentiel de l’agitation. Dans cette zone rurale reculée, plusieurs milliers de chrétiens ont fui dans les collines et forêts alentours, de peur d’être pris pour cible par les extrémistes hindous. Les premiers camps de réfugiés se sont mis en place.
Malgré la proclamation ce mardi d’un couvre-feu, puis de l’ordre de tirer à vue le lendemain, les autorités locales ne parviennent pas à enrayer le cycle de violence. Le rétablissement de la paix civile semble d’autant plus compromis que les forces de l’ordre sont régulièrement suspectées de collusion avec les émeutiers hindous. “Les policiers sont restés immobiles et ont regardé la scène entière” témoignait au Indian Express Pishpalata Digal, un jeune chrétien qui a échappé à une foule hystérique, armée de barres de fer et de lathis.
Le Premier ministre Manmohan Singh a fait part hier de sa “honte” à une délégation catholique venue demander au gouvernement de prendre les mesures adéquates afin de restaurer l’ordre en Orissa. Mais malgré 167 arrestations rapportées jusqu’à maintenant, les violences se poursuivent ce vendredi et plusieurs routes sont toujours bloquées par les émeutiers. Selon les sources officielles, de nouvelles troupes paramilitaires sont attendues à Kandhamal.
Majoritairement tribal, ce district est l’un des plus pauvres de l’Orissa, mais aussi, depuis quelques années, le plus tristement célèbre. Des vagues de persécution anti-chrétienne ressurgissent épisodiquement, la dernière remontant à noël dernier. Les chrétiens, qui représentent 20% de la population (contre 2,3% au niveau national, ndlr), sont régulièrement pointées du doigt par les organisations de l’hindouisme militant. Le religieux assassiné ce samedi avec quatre de ses fidèles, Swami Laxamanananda Saraswati, 85 ans, était d’ailleurs à la tête d’une campagne contre les conversions au christianisme.
Le prosélytisme chrétien reste une question très sensible dans le pays, particulièrement lorsqu’il concerne les tribus et les intouchables, où le zèle des missionnaires est souvent perçu comme agressif. Depuis plusieurs décennies, des activistes comme Saraswati militent ainsi pour “ramener” ces populations convertis dans le giron de l’hindouisme. Le gouffre entre les deux communautés s’agrandit donc un peu plus chaque jour. La dimension politique des récentes violences ne peut cependant être ignorée, les élections législatives locales en Orissa se tenant dans quelques mois.
Quoiqu’il en soit, le gouvernement indien est aujourd’hui sous pression. Alors que le Vatican a déjà fait savoir qu’il condamnait “fermement” les attaques, le ministre des Affaires Etrangères italien a convoqué l’ambassadeur de l’Inde à Rome pour exiger que des mesures soient prises pour protéger les chrétiens.
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